C'est une tradition pour Lolita Séchan : quand arrive le mois d'août, direction le Midi. « Mon grand-oncle était médecin dans la région. Petit à petit, en récupérant des pierres qui traînaient sur les bords d'un ruisseau, il a construit une maison près d'Avignon. » Ce petit mas – que les parents de la dessinatrice, le chanteur Renaud et son ex-femme Dominique Quilichini ont récupéré et retapé – est le lieu de ses premiers souvenirs de vacances. « On était un groupe de quatre amis du même âge. On était des Mowgli, toute la journée à poil dans les arbres. » C'est quand sa fille est née que Lolita Séchan a ressenti l'envie de passer à nouveau une partie de ses vacances dans la maison familiale. « Depuis, on se retrouve tous les ans là-bas, avec les mêmes copains. » La maison s'est agrandie – « elle est plus confortable ! » –, mais l'esprit reste le même qu'il y a quelques dizaines d'années : se retrouver, en bande, et s'éclater. Savourer l'été. « Au fil des années, on a commencé à faire un potager. C'est le bonheur total. Tous les jours, on a une production de tomates à tomber par terre, qu'on mange juste avec un filet d'huile d'olive… » Le goût du bonheur. « Cet endroit, c'est le retour à l'enfance, le refuge. C'est vraiment ma madeleine de Proust. »

Terre sauvage

« J'ai un rapport aux vacances très enfantin », explique, un brin de malice dans la voix, la dessinatrice. Travailler jusqu'à 1 heure du matin ? Pas de problème. Travailler les jours fériés ? Normal. Mais quand arrive le 1er juillet… « Je me dis que ça y est, que j'ai deux mois pour voyager, me déconnecter ! » Les vacances sont aussi l'occasion pour elle de faire de grands voyages. « J'ai eu la chance d'avoir des parents pour qui il était important de voyager et qui m'ont emmenée dans plein d'endroits. » Adolescente, Lolita Séchan a continué sur cette lancée. « Avec ma meilleure copine, quand on était au lycée, on bossait l'été pour mettre de l'argent de côté et partir, sac sur le dos, au Canada, en Asie, en Pologne. On avait une obsession : on voulait voyager dans des pays où il s'était passé des drames pour essayer de comprendre un peu l'histoire de l'humanité. On avait des lubies un peu étranges », convient en riant la dessinatrice.

Je suis monomaniaque avec l'Asie du Sud-Est.

Aujourd'hui, de nouvelles obsessions ont remplacé les anciennes. « Je suis monomaniaque avec l'Asie du Sud-Est. Le Vietnam , cela a été mon histoire d'amour il y a quinze ans. Je l'ai raconté dans la BD Les Brumes de Sapa (éd. Delcourt). » Mais, récemment, de nouvelles envies sont apparues. « On est dans une époque pressée, et en ce moment, j'ai envie de me déconnecter complètement, d'aller dans un endroit encore entièrement sauvage. » Le rêve de Lolita Séchan : arpenter l'Alaska. Mais ? « C'est compliqué. Alors, je me suis rabattue sur l'idée d'aller marcher, fin juillet, seule en Islande. » Un projet que la dessinatrice devra sans doute abandonner, boulot oblige. « J'ai subi une opération du dos il n'y a pas longtemps et j'ai pris du retard. » Lolita Séchan est donc partie en vacances avec cette année quelques devoirs : un album pour enfants de 25 pages à terminer fin août. « 25 pages, c'est relativement court, mais je ne sais pas si c'est faisable. Je suis très lente », confie la dessinatrice.

Tous mes grands projets sont nés à l'étranger

« Contrairement à l'écriture, le dessin est quelque chose qui m'apaise énormément. Mais aucun dessin ne sort facilement. Je n'ai pas eu de formation. » En voyage, Lolita Séchan prend le temps. « Je me pose, et c'est de la rêverie animée. Dessiner est la meilleure manière d'apprécier les choses, de se poser, de voir la lumière qui change, les gens autour de soi. C'est un moyen d'observation très doux. Beaucoup moins intrusif que la photographie. » C'est aussi, la dessinatrice a eu l'occasion de s'en rendre compte, un excellent moyen de communication. « Au Vietnam, par exemple, je me mettais en terrasse et les gens venaient dessiner dans mon carnet. Au Japon, où les gens ne parlent pas beaucoup anglais, cela a été pour moi un moyen de communiquer incroyable. » Mais l'importance des voyages va pour Lolita Séchan bien au-delà du plaisir de découvrir de nouveaux horizons. « Tous mes grands projets sont nés à l'étranger. Être hors de mes repères, de mes automatismes, de ma routine, cela laisse le champ libre à la création, à l'inspiration. » Mention spéciale pour le Québec où Lolita Séchan a écrit son premier roman pour enfant, Les Cendres de maman (éd. Les 400 Coups), et où lui est aussi venue l'idée de sa prochaine série d'albums jeunesse publiée chez Actes Sud. Rendez-vous à l'automne pour découvrir la famille Biloba. Cette famille de taupes, on l'aime déjà !

 

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